Homosexualité et tabou familial
Publié : 08 févr. 2021 22:45
Bonjour à tous,
J’ai 32 ans, je suis homosexuel, et le sujet est tabou avec mes parents depuis mon coming-out.
De mon enfance au lycée, j’ai toujours été amoureux de filles. En terminale, je suis sorti pour la première fois avec l’une d’elle. Mes parents la connaissaient, il s’agissait d’une très bonne amie à moi depuis la seconde. Après le bac, j’ai quitté la Bretagne pour l’Anjou pour mes études. Nous nous sommes finalement séparés à la fin de ma première année d’étude, après 1 an et demi de relation.
Pendant mes années étudiantes, j’ai commencé à ressentir de l’attirance pour les garçons. Cela m’a beaucoup perturbé. J’étais dans le déni. Je n’en avais parlé à aucun de mes amis et encore moins à mes parents. Et pour cause. Un jour devant un reportage à la télévision sur un couple homosexuel, ma mère me dit : « J’espère que tu ne nous annonceras jamais ça ». Au bout de quelques temps, j’ai commencé à considérer que j’étais peut-être bisexuel. Mais plus le temps passait, et plus je sentais que j’étais physiquement et sexuellement principalement intéressé par les garçons. Au bout de ma cinquième année d’étude, nous sommes en 2011, et après un long cheminement, j’ai commencé à en parler à mes amis les plus proches. Je savais que leur réaction serait très bienveillante, j’étais en confiance. Au cours de ces 5 années d’études, certain.es de mes ami.es avaient fait leur coming-out, je n’étais donc plus tout seul. C’est à partir de ce moment-là que j’ai commencé à accepter l’idée que moi, c’était finalement les garçons que j’aimais.
A partir de 2012, je rentre dans le monde professionnel. J’ai déjà connu une ou deux expériences avec des garçons, j’assume de plus en plus mon orientation vis-à-vis de moi-même. En revanche, je n’en parle ni au travail ni à ma famille. Deux ans plus tard, je fais la connaissance d’un garçon, et ainsi commence ma première histoire d’amour avec un homme. J’ai 26 ans.
Pendant un an, mes parents et ma sœur ne sont au courant de rien, je n’ose pas leur en parler. Nous avons cette habitude de nous appeler une fois par semaine avec ma mère et mon père. Je suis obligé de gommer un peu la réalité lorsque je leur raconte ma semaine et mes week-ends. Un restaurant avec mon copain devient un resto entre potes, un week-end chez des amis à lui devient un week-end posé chez moi. Cela devient compliqué à gérer et lourd psychologiquement. Je me décide à franchir le pas. Je commence par ma sœur, avec qui j’ai une belle complicité. Elle accueille la nouvelle avec beaucoup de bienveillance, elle est contente que j’ai rencontré quelqu’un, je suis soulagé. C’est un soutien de poids pour la prochaine étape. J’ai prévu de l’annoncer à mes parents le lendemain.
C’est un dimanche midi, en juillet 2015. Le déjeuner se termine. Mes parents et ma sœur s’affairent en cuisine. Je me lance. « J’ai quelque chose à vous dire… ». Mes parents se retournent l’un et l’autre. Ma mère comprend que j’ai quelque chose d’important à leur annoncer. « Voilà, j’ai rencontré quelqu’un et … c’est un garçon. ». Le ciel leur tombe sur la tête. Mes parents se prennent dans les bras l’un et l’autre et pleurent. Ma mère est sous le choc, elle se prend la tête avec les mains. « Pourquoi tu nous fais ça ? ». Ma sœur ne pensait pas que mes parents réagiraient de cette façon, elle tente de prendre ma défense. Ma mère me prend finalement dans ses bras un court instant en me disant qu’elle m’aime. Elle me demande depuis combien de temps je suis avec ce garçon. « Un an. » C’est le coup de massue qui l’achève. Mon père s’exprime peu mais il est aussi assommé. « Je comprends mieux ce qu’on ressenti les parents d’Olivier. ». Olivier, c’est un copain du lycée qui a fait son coming-out auprès de ses parents, huit ans plus tôt. Ma mère ne comprend pas. « Pourtant tu as eu des petites copines ! ». Je tente de leur expliquer que j’ai n’ai pas choisi d’aimer les garçons et que c’est arrivé comme ça. Je ne m’attarde pas chez eux, il faut leur laisser le temps de digérer. Je repars chez moi.
A partir de ce jour, ma relation n’a plus jamais été la même avec ma mère. Fini les appels hebdomadaires pour prendre des nouvelles. Fini les « chéri » ou « gros bisous » dans les textos. Le lien est coupé. Deux semaines après mon coming-out, j’appelle mes parents pour tout de même prendre de leurs nouvelles. Le ton de ma mère est à la fois sec et triste. J’ose lui demander comment elle va. « Comment veux-tu que ça aille ? Non, ça ne va pas. » Mon père prend finalement les choses avec plus de distance et il me dit peu de temps après au téléphone qu’il respectera mon choix même si ce n’est pas ce qu’il avait envisagé pour moi. S’en suivront plus tard avec ma mère des échanges par textos. Elle me dit qu’elle pensait me connaitre mais que ce n’est pas le cas, elle me reproche de lui avoir caché une partie de ma vie pendant un an, si ce n’est plus. Le fait que je sois avec un homme la dégoute. Je ne peux pas la laisser dire ça et lui réponds que je ne veux pas de son dégoût et qu’elle peut le garder pour elle. J’essaie de lui faire comprendre qu’elle a deux enfants dont elle n’a jamais eu à se plaindre, équilibrés et qui se débrouillent plutôt bien dans leurs études et leur vie professionnelle, le plus important n’est-il pas qu’ils soient heureux ? Le temps passe, nous n’en parlons plus, le contact reprend peu à peu, mais je sais que cela reste compliqué pour ma mère. Un soir je l’ai au téléphone, ils sont chez une amie à eux qui vient d’être grand-mère. Sa voix tremblote, elle tente de cacher son chagrin. Malgré tout cela, je suis toujours resté le bienvenu chez mes parents et à aucun moment cela n’a été remis en question. Assez rapidement après mon coming-out, j’ai repris mes habitudes et je suis revenu passé un week-end chez eux, avec ma sœur, à raison d’une fois par mois environ.
Après 3 ans de relation avec mon copain, nous nous séparons. Mes parents ne m’ont jamais posé une seule question sur lui. Ils n’ont jamais cherché à le connaitre et je n’ai pas cherché à l’imposer. Le tabou est total. Je poursuis ma vie. Les réactions de ma mère ont été dures à encaisser, mais progressivement nous parvenons à recréer un lien. J’ai aussi besoin d’apaisement. Je préfère donc ne pas leur en reparler pour le moment.
Aujourd’hui, plus de 5 ans après mon coming-out, nous n’en avons toujours pas reparlé. La relation avec ma mère s’est nettement améliorée. Je n’ai aucun doute sur le fait que mes parents m’aiment. Ils sont pleins d’attention envers ma sœur et moi. Nous aimons passer du temps ensemble. Mais le temps a passé et les situations changent. Ma sœur a rencontré un garçon l’année dernière, tout se passe bien et elle a d’ailleurs emménagé avec lui. Ce garçon a été très bien accueilli dans la famille. Je suis très heureux pour ma sœur et je dois avouer que je l’envie. J’aurais aimé que cela soit aussi simple pour moi. De mon côté, j’ai également rencontré un garçon depuis l’été dernier, avec qui cela se passe bien. Mais indépendamment de cette relation, le moral n’est pas là depuis quelques temps. Ce tabou autour de mon homosexualité vis-à-vis de mes parents me pèse beaucoup. J’ai aujourd’hui 32 ans et j’ai le sentiment d’avoir beaucoup de difficultés à avancer dans ma vie professionnelle et personnelle. Je stagne. Alors que je vois les autres à côté de moi avancer, notamment mes amis. Ils achètent leur maison, ils fondent leur famille, ils changent de travail. Je ne veux pas accabler mes parents mais je sens au fond de moi que ce coming-out difficile et ce tabou m’emprisonnent. Je ne suis pas totalement moi, en premier lieu avec ma famille - avec mes parents qui sont les seuls au courant, mes grand-mères qui s’impatientent de ne pas me voir avec une copine, mes oncles et tantes et cousins cousines, en second lieu avec mes collègues de travail. Je cache une partie de moi-même à tous ces gens et c’est de plus en plus lourd à porter.
Je ne peux plus continuer comme ça. J’ai l’impression de passer à côté de ma vie. J’aimerais ré-aborder le sujet de mon homosexualité avec mes parents, leur présenter mon copain mais c’est encore difficile pour moi. J’appréhende notamment beaucoup la réaction de ma mère. Pourtant il va falloir. Je souhaite crever l’abcès. J’ai besoin de leur soutien pour me libérer et m’assumer complètement.
Quelle approche me conseilleriez-vous ? Quels mots employer ? Je pensais leur écrire…
Merci de m'avoir lu jusqu'au bout... Merci d'avance pour votre aide.
Flo49
J’ai 32 ans, je suis homosexuel, et le sujet est tabou avec mes parents depuis mon coming-out.
De mon enfance au lycée, j’ai toujours été amoureux de filles. En terminale, je suis sorti pour la première fois avec l’une d’elle. Mes parents la connaissaient, il s’agissait d’une très bonne amie à moi depuis la seconde. Après le bac, j’ai quitté la Bretagne pour l’Anjou pour mes études. Nous nous sommes finalement séparés à la fin de ma première année d’étude, après 1 an et demi de relation.
Pendant mes années étudiantes, j’ai commencé à ressentir de l’attirance pour les garçons. Cela m’a beaucoup perturbé. J’étais dans le déni. Je n’en avais parlé à aucun de mes amis et encore moins à mes parents. Et pour cause. Un jour devant un reportage à la télévision sur un couple homosexuel, ma mère me dit : « J’espère que tu ne nous annonceras jamais ça ». Au bout de quelques temps, j’ai commencé à considérer que j’étais peut-être bisexuel. Mais plus le temps passait, et plus je sentais que j’étais physiquement et sexuellement principalement intéressé par les garçons. Au bout de ma cinquième année d’étude, nous sommes en 2011, et après un long cheminement, j’ai commencé à en parler à mes amis les plus proches. Je savais que leur réaction serait très bienveillante, j’étais en confiance. Au cours de ces 5 années d’études, certain.es de mes ami.es avaient fait leur coming-out, je n’étais donc plus tout seul. C’est à partir de ce moment-là que j’ai commencé à accepter l’idée que moi, c’était finalement les garçons que j’aimais.
A partir de 2012, je rentre dans le monde professionnel. J’ai déjà connu une ou deux expériences avec des garçons, j’assume de plus en plus mon orientation vis-à-vis de moi-même. En revanche, je n’en parle ni au travail ni à ma famille. Deux ans plus tard, je fais la connaissance d’un garçon, et ainsi commence ma première histoire d’amour avec un homme. J’ai 26 ans.
Pendant un an, mes parents et ma sœur ne sont au courant de rien, je n’ose pas leur en parler. Nous avons cette habitude de nous appeler une fois par semaine avec ma mère et mon père. Je suis obligé de gommer un peu la réalité lorsque je leur raconte ma semaine et mes week-ends. Un restaurant avec mon copain devient un resto entre potes, un week-end chez des amis à lui devient un week-end posé chez moi. Cela devient compliqué à gérer et lourd psychologiquement. Je me décide à franchir le pas. Je commence par ma sœur, avec qui j’ai une belle complicité. Elle accueille la nouvelle avec beaucoup de bienveillance, elle est contente que j’ai rencontré quelqu’un, je suis soulagé. C’est un soutien de poids pour la prochaine étape. J’ai prévu de l’annoncer à mes parents le lendemain.
C’est un dimanche midi, en juillet 2015. Le déjeuner se termine. Mes parents et ma sœur s’affairent en cuisine. Je me lance. « J’ai quelque chose à vous dire… ». Mes parents se retournent l’un et l’autre. Ma mère comprend que j’ai quelque chose d’important à leur annoncer. « Voilà, j’ai rencontré quelqu’un et … c’est un garçon. ». Le ciel leur tombe sur la tête. Mes parents se prennent dans les bras l’un et l’autre et pleurent. Ma mère est sous le choc, elle se prend la tête avec les mains. « Pourquoi tu nous fais ça ? ». Ma sœur ne pensait pas que mes parents réagiraient de cette façon, elle tente de prendre ma défense. Ma mère me prend finalement dans ses bras un court instant en me disant qu’elle m’aime. Elle me demande depuis combien de temps je suis avec ce garçon. « Un an. » C’est le coup de massue qui l’achève. Mon père s’exprime peu mais il est aussi assommé. « Je comprends mieux ce qu’on ressenti les parents d’Olivier. ». Olivier, c’est un copain du lycée qui a fait son coming-out auprès de ses parents, huit ans plus tôt. Ma mère ne comprend pas. « Pourtant tu as eu des petites copines ! ». Je tente de leur expliquer que j’ai n’ai pas choisi d’aimer les garçons et que c’est arrivé comme ça. Je ne m’attarde pas chez eux, il faut leur laisser le temps de digérer. Je repars chez moi.
A partir de ce jour, ma relation n’a plus jamais été la même avec ma mère. Fini les appels hebdomadaires pour prendre des nouvelles. Fini les « chéri » ou « gros bisous » dans les textos. Le lien est coupé. Deux semaines après mon coming-out, j’appelle mes parents pour tout de même prendre de leurs nouvelles. Le ton de ma mère est à la fois sec et triste. J’ose lui demander comment elle va. « Comment veux-tu que ça aille ? Non, ça ne va pas. » Mon père prend finalement les choses avec plus de distance et il me dit peu de temps après au téléphone qu’il respectera mon choix même si ce n’est pas ce qu’il avait envisagé pour moi. S’en suivront plus tard avec ma mère des échanges par textos. Elle me dit qu’elle pensait me connaitre mais que ce n’est pas le cas, elle me reproche de lui avoir caché une partie de ma vie pendant un an, si ce n’est plus. Le fait que je sois avec un homme la dégoute. Je ne peux pas la laisser dire ça et lui réponds que je ne veux pas de son dégoût et qu’elle peut le garder pour elle. J’essaie de lui faire comprendre qu’elle a deux enfants dont elle n’a jamais eu à se plaindre, équilibrés et qui se débrouillent plutôt bien dans leurs études et leur vie professionnelle, le plus important n’est-il pas qu’ils soient heureux ? Le temps passe, nous n’en parlons plus, le contact reprend peu à peu, mais je sais que cela reste compliqué pour ma mère. Un soir je l’ai au téléphone, ils sont chez une amie à eux qui vient d’être grand-mère. Sa voix tremblote, elle tente de cacher son chagrin. Malgré tout cela, je suis toujours resté le bienvenu chez mes parents et à aucun moment cela n’a été remis en question. Assez rapidement après mon coming-out, j’ai repris mes habitudes et je suis revenu passé un week-end chez eux, avec ma sœur, à raison d’une fois par mois environ.
Après 3 ans de relation avec mon copain, nous nous séparons. Mes parents ne m’ont jamais posé une seule question sur lui. Ils n’ont jamais cherché à le connaitre et je n’ai pas cherché à l’imposer. Le tabou est total. Je poursuis ma vie. Les réactions de ma mère ont été dures à encaisser, mais progressivement nous parvenons à recréer un lien. J’ai aussi besoin d’apaisement. Je préfère donc ne pas leur en reparler pour le moment.
Aujourd’hui, plus de 5 ans après mon coming-out, nous n’en avons toujours pas reparlé. La relation avec ma mère s’est nettement améliorée. Je n’ai aucun doute sur le fait que mes parents m’aiment. Ils sont pleins d’attention envers ma sœur et moi. Nous aimons passer du temps ensemble. Mais le temps a passé et les situations changent. Ma sœur a rencontré un garçon l’année dernière, tout se passe bien et elle a d’ailleurs emménagé avec lui. Ce garçon a été très bien accueilli dans la famille. Je suis très heureux pour ma sœur et je dois avouer que je l’envie. J’aurais aimé que cela soit aussi simple pour moi. De mon côté, j’ai également rencontré un garçon depuis l’été dernier, avec qui cela se passe bien. Mais indépendamment de cette relation, le moral n’est pas là depuis quelques temps. Ce tabou autour de mon homosexualité vis-à-vis de mes parents me pèse beaucoup. J’ai aujourd’hui 32 ans et j’ai le sentiment d’avoir beaucoup de difficultés à avancer dans ma vie professionnelle et personnelle. Je stagne. Alors que je vois les autres à côté de moi avancer, notamment mes amis. Ils achètent leur maison, ils fondent leur famille, ils changent de travail. Je ne veux pas accabler mes parents mais je sens au fond de moi que ce coming-out difficile et ce tabou m’emprisonnent. Je ne suis pas totalement moi, en premier lieu avec ma famille - avec mes parents qui sont les seuls au courant, mes grand-mères qui s’impatientent de ne pas me voir avec une copine, mes oncles et tantes et cousins cousines, en second lieu avec mes collègues de travail. Je cache une partie de moi-même à tous ces gens et c’est de plus en plus lourd à porter.
Je ne peux plus continuer comme ça. J’ai l’impression de passer à côté de ma vie. J’aimerais ré-aborder le sujet de mon homosexualité avec mes parents, leur présenter mon copain mais c’est encore difficile pour moi. J’appréhende notamment beaucoup la réaction de ma mère. Pourtant il va falloir. Je souhaite crever l’abcès. J’ai besoin de leur soutien pour me libérer et m’assumer complètement.
Quelle approche me conseilleriez-vous ? Quels mots employer ? Je pensais leur écrire…
Merci de m'avoir lu jusqu'au bout... Merci d'avance pour votre aide.
Flo49