Les Entreprises sont elles homophobes ?

[JeanChristophe]

L'interview du mois

Les entreprises sont-elles homophobes ?

Interview de Christophe Falcoz, directeur du cabinet RCF Management, auteur de l'étude sur l'homophobie en entreprise publiée par la Halde

L’homosexualité paraît de plus en plus acceptée dans notre société. Mais qu’en est-il dans les entreprises ? La Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) vient de publier une étude sur ce sujet délicat. Quels enseignements en tirer ? Le point avec M. Christophe Falcoz, directeur du cabinet RCF Management, auteur de l’étude.







Les salariés ont-ils tendance à cacher ou à dévoiler leur homosexualité ?
La tendance est clairement au non dévoilement, puisque 66 % des répondant(e)s disent n’avoir plutôt pas dévoilé leur orientation sexuelle durant leur parcours professionnel (valeur 0 à 5 sur une échelle allant de 0 à 10). Toujours parmi les 1413 personnes interrogées, 17 % n’en ont jamais parlé au travail.

Quelles sont leurs stratégies pour « cacher » leur homosexualité ?
Différentes stratégies sont mises en œuvre dont les faux semblants (par exemple utiliser des mots comme ami ou conjoint pour désigner leur « amoureux(se) )», la dissimulation (s’en tenir aux aspects strictement professionnels au travail) ou la couverture (elles/ils s’inventent un partenaire du sexe opposé ou encore se font passer pour un(e)célibataire endurci(e)).

Se sentent-ils discriminés dans l’entreprise ?
Beaucoup se cachant, les niveaux de discrimination perçue peuvent paraître faibles. Néanmoins, 12 % déclarent avoir été mis hors jeu lors d’une promotion et 8 % lors d’une embauche durant leur parcours professionnel.

Paris et la province sont-ils logés à la même enseigne ?
Il n’y a pas de différence notoire, mais l’homophobie implicite perçue à Paris et dans sa proche banlieue est un peu plus forte qu’ailleurs, ce qui va à l’encontre de l’idée d’une « capitale plus tolérante ».

Quels sont les secteurs les plus tolérants et ceux qui le sont le moins de ce point de vue ?
Sur les 7 principaux secteurs (sur 15 au total), les gays et les lesbiennes se cachent dans les industries manufacturières et se dévoilent plus facilement dans le secteur transport/communication. Les homophobies perçues sont élevées pour le secteur immobilier/location et service aux entreprises. C’est dans le secteur de l’éducation/formation que les discriminations perçues dans l’emploi sont les plus élevées.

La taille de l’entreprise est-elle déterminante ?
Il existe effectivement des variations dans les perceptions en fonction de la taille de l’entreprise. Dans les plus petites entreprises, les discriminations perçues y sont plus importantes, et dans les grandes, les salarié(e)s s’y cachent plus et y ressentent plus d’homophobie.
Quels sont les effets de cette homophobie sur les salariés ?
Tout d’abord une volonté de passer à l’action (se défendre, rechercher des appuis, se mettre en colère…), puis un repli sur soi (prudence, stress, démotivation, culpabilité…), et dans une moindre mesure, le retrait (mutation, démission, négociation de licenciement…).

Comment les employeurs peuvent-ils lutter contre l’homophobie au sein des entreprises ?
Il semble nécessaire de mettre en place un véritable management de la diversité qui valorise les différences a priori et lutte contre les micro discriminations dont les gays et les lesbiennes sont victimes du fait d’un environnement de travail souvent largement « hétérocentré ». Cela passe donc par une attention au langage (partenaire plutôt que marié), à l’image (communication interne et externe) mais surtout par l’engagement de l’encadrement supérieur dans la lutte contre l’homophobie.

Consulter l'étude sur le site de la Halde