Mère d'enfant transgenre en questionnement

[NadineB56]

Pour en savoir un peu plus sur VOUS...
- Votre pseudo sur ce forum : NadineB56
- Pourquoi ce pseudo : c'est mon prénom
- Votre date de naissance : 29/08/1957
- L'agglomération la plus proche de chez vous : VANNES (56)
- Votre activité (étudiant, chômeur, travailleur) ? retraitée
- Dans quelle secteur d'activité êtes vous ? Informatique
- Etes vous une femme, un homme... ou autre ? femme
- Pourquoi vous êtes vous inscrit sur ce forum (qu'attendez vous de ce forum) ? Ecoute, aide, compréhension
- Vos Loisirs : méditation, peinture
- Etes-vous Parent d'un ou plusieurs enfants homo ? proche d'homo ? homo, bi ou en questionnement sur votre orientation affective et sexuelle ? oui
- Comment avez vous connu Contact ? par relation
- Si vous êtes adhérent-e, à quelle(s) association(s) et/ou antenne(s) "Contact" avez vous adhéré ? non
- Si vous êtes adhérent-e, en quelle année avez vous adhéré ?
- Quel est votre rôle au sein de cette association "Contact" (vous participez aux réunions ouvertes, vous avez en charge un sujet particulier... etc) ? Je suis un simple membre.

Pour en savoir un peu plus sur VOTRE FAMILLE...
- Votre situation familiale (êtes vous pacsé-e, en couple, célibataire, marié-e, divorcé-e, veuf, veuve, re-marié...) ? mariée
- Avez vous des enfants ? oui
- En tant que parent êtes-vous au courant de l'orientation sentimentale de votre enfant ? oui
- Vos proches sont-ils au courant ? non
- Est ce que cela ce passe bien avec votre enfant ? oui, en apparence
- Comment vivez vous l'orientation sentimentale et sexuelle de votre ou de vos enfants ? très difficilement

Pour en savoir un peu plus sur VOTRE ENVIRONNEMENT PROFESSIONNEL...
- Les collègues de votre enfant sont-ils au courant ? oui
- Est ce que cela ce passe bien avec eux ? oui

Ma fille, 27 ans, qui a eu un compagnon puis une compagne pendant plusieurs années, me dit qu'elle est non binaire., de genre plutôt masculin
Je l'ai appris tout à fait par hasard. Je souhaite préserver le lien avec iel, mais je ne supporte pas certaines choses. Je sombre dans la dépression , la sidération. Mon enfant semble être soulagé de se savoir transgenre, d'avoir pu mettre un mot sur la personne qu'iel est. Comment ne pas rompre notre relation?

[benjamin49]

Bonjour Nadine,

tout d'abord soyez la bienvenue sur le forum.

J'imagine ce que vous pouvez ressentir sur la base de plusieurs témoignages de parents dont l'enfant a fait une transition.
Plusieurs possibilités s'offrent à vous :
- appeler la ligne d'écoute nationale anonyme et gratuite au 0 805 69 64 64
- prendre contact avec l'association la plus proche de chez vous (rennes ou nantes 35 ou 44@asso-contact.org) et solliciter un rendez vous avec leurs bénévoles
- participer à l'un de leur groupe de paroles
- laisser un message plus détaillé sur le forum pour avoir la réponse de personnes ayant vécu une situation similaire. Dans ce cas, si vous le pouvez vous pourriez expliquer ce que vous ne supportez pas et comment cela met en péril la relation avec votre enfant.

Qu'en pensez-vous ? Quelle solution vous semble la plus adaptée ?

Benjamin

[NadineB56]

Bonjour,
Je vous remercie pour tous ces renseignements:
- numéro de téléphone (j'essaierai en dehors des vacances scolaires)
- mon mari et moi-même prendront rendez-vous auprès d'un bénévole
- participer à un groupe de parole nous semble difficile étant donné notre éloignement de Vannes ou de Rennes (1h30 de route)
- merci pour l'adresse mail que je peux contacter dans le 44.
J'ai omis de vous dire que je suis bipolaire diagnostiquée depuis 28 ans . A l'époque on disait maniaco-dépressive.
J'ai connu des extrêmes en tous genres, dont la volonté de divorce d'avec mon conjoint actuel, ou autres que je regrettais dans mes phases dépressives. Mon enfant a vécu cela très difficilement. Iel n'a pas pu s'identifier à la personne féminine que j'étais. On sait maintenant que ce trouble est héréditaire si on subit un choc émotionnel intense, comme une rupture amoureuse compliquée.
Ce qui me fait extrêmement peur, c'est que mon enfant ne soit pas bien suivi par un spécialiste qui pourrait détecter cette maladie. Iel pourrait alors avoir des comportements extrêmes, ... et le regretter plus tard. C'est une de mes pensées. Je suis aussi peut-être simplement dans le déni.
Ma relation avec mon enfant n'est pas mises en péril. Jamais il ne me viendrait à l'idée de le repousser, mais l'accompagner dans sa transition va être difficile tellement j'ai peur.
Iel me dit qu'iel pense comme un garçon depuis la grande section. Je ne comprends pas ce que ça veut dire. Garçon ou fille n'ont pas forcément des modes de pensée différents. Garde-t-iel encore des stéréotypes masculins et féminins?
C'est en général à la puberté que la souffrance commence pour l'adolescent. A l'heure actuelle, iel a plus de 27 ans et ne se situe dans aucun genre, elle est non binaire. Iel souffre depuis longtemps de sa poitrine et n'envisage pas la prise d'hormones masculines.
Iel n'envisage pas une vie seul, ce serait une atrocité à ses yeux. J'ai eu la maladresse de lui demander avec qui iel envisageait une relation sinon avec un/une transgenre. Iel l'a très mal pris.
Bref, je suis un peu perdue, je vous remercie chaudement d'exister. Merci aux bénévoles, merci pour les témoignages.
Bonne Journée à toutes et tous.

[AliceJ]

Bonsoir Nadine,

J'aimerai partager un peu avec vous.
Le texte qui suit ne me concerne que moi et n'a rien à voir avec votre enfant, car nous sommes après tout deux personnes bien distinctes. Si vous voyez des passages qui vous intéresse dans ce que j'écris, n'hésitez pas à piocher dedans.

Je m'appelle Alice, j'ai 25 ans et à ma naissance on m'a donné un prénom masculin.
J'ai 4 frères et 2 sœurs, ma mère n'est pas ce que l'on qualifierait de très "féminine", et mon enfance n'a pas été féminine du tout. Lors de mon enfance, les rares cas où j'ai été perçue fille m'ont valu moqueries.
L'adolescence, la puberté, a été difficile pour moi. Outre le souhait et prières pendant ma jeune enfance dans l'espoir de me réveiller fille, là les signaux se sont allumés comme quoi mon corps clochait réellement et j'ai essayée de me persuader que c'était une phase et que ça allait passer, en ne disant toujours pas pourquoi j'étais mal à mon entourage car ne souhaitant pas être réprimandée et/ou moquée.
J'ai tout caché jusqu'à 24 ans, ce qui a apparemment bien fonctionné car mon coming out à été un coup de bambou pour beaucoup.

Et donc pour en revenir à tout ça, je déteste le fait d'être trans, mais je suis trans c'est juste comme ça, je n'ai pas choisi. Je m'en suis moi-même beaucoup voulue pendant une longue période de ne pas être "normale".
Ce n'est en rien dû à un père absent, une mère trop présente ni autre manque de masculinité ou de virilité dans le foyer. D'ailleurs je suis relativement typée "masculine" si l'on juge sur le fait que je suis très bricoleuse et que j'ai fait un métier à grande majorité masculine. Une dextérité manuelle acquise en partie par mon père.
Donc voilà, je ne suis pas trans du fait d'une éducation qui aurait raté mais je suis juste née comme ça.
Et donc, ne soyez pas trop dure avec vous même sur ce sujet.

J'ai eu la maladresse de lui demander avec qui iel envisageait une relation sinon avec un/une transgenre. Iel l'a très mal pris.

N'y voyez rien de personnel, mais ma mère m'avait dit à peu près la même chose dans la période qui a suivi mon coming out et je vous garantie que cela m'a fait très mal. Cela donne l'impression qu'il y a d'un côté les personnes qui ne sont pas trans (cisgenres) et de l'autre côté les personnes transgenres, anormales, qui ne peuvent que vivre entre elles, séparées de la société.
Pourtant je vis une vie que je qualifierait de globalement relativement normale, chiante même.
Je vais en cours, je galère avec les grèves, je me lève tôt, je bricole, je sors, je fais des lessives.
Je vis une vie banale, comme la plupart des gens, et c'est peut-être cela le plus important dans l'histoire, je vis.

Enfin, c'est normal que vous soyez inquiète pour votre enfant, le contraire m'inquiéterai d'avantage. A partir du moment où vous entretenez toujours le dialogue avec iel et vous renseignez pour essayer de mieux comprendre tout cela, je pense que votre situation ne peux qu'aller de l'avant.
Le fait que vous soyez venue ici sur ce forum pour échanger montre une intention de votre part d'essayer de mieux comprendre la situation à laquelle vous êtes confrontée. Je ne peux que vous féliciter pour votre initiative car beaucoup font l'erreur de s'enfermer dans le silence et le non-dit.


En vous souhaitant une très bonne soirée,

Alice

[NadineB56]

Bonjour Alice,
Merci pour votre témoignage. Il m'éclaire sur beaucoup de points.
Vous dites qu'on vous a attribué à votre naissance un prénom masculin, mais que vous vous êtes toujours sentie appartenir au genre féminin. Mon fils me dit s'être aperçu qu'iel pensait comme un garçon dès la grande section de maternelle, qu'iel a vécu difficilement sa puberté car dès leur apparition, des attributs typiquement féminins et même maternels sont apparus sur son torse. Iel n'a jamais supporté sa poitrine, d'où le fait d'envisager la mastectomie (qui m'effraie) sans rien changer d'autre à son corps. Par contre, iel souhaite qu'on l'appelle d'un prénom masculin (mixte plutôt) désormais, à 27 ans, ce que j'accepte sans ciller. Iel fait donc son coming out après plusieurs année de malaise, de souffrance même je suppose, d'errance amoureuse, pour être conforme à la personne qu'iel est. Vous aussi vous êtes révélée aux autres telle que vous êtes assez tard. Je n'ai pas vu sa souffrance, iel-même ne la comprenait pas tout à fait, jusqu'à ce qu'une psychologue mette un nom sur son mal-être: la non binarité.
J'ai apprécié que vous mettiez entre parenthèses l'adjectif "normal". C'est un terme que j’abhorre car il veut mettre chaque personne dans une case, un non respect de la différence entre les êtres, la non tolérance.

Je culpabilise en effet pour le fait que je n'ai pas été à la hauteur de mon rôle maternel. J'ai lu que "La dysphorie de genre n'est pas une maladie psychiatrique, mais un conflit dans la construction identitaire". Comment a-t-iel construit son identité dans une famille bancale? En fait, ne serions nous pas responsable du trouble qu'iel a vécu? Iel dit maintenant que c'est sa véritable nature, c'est tout.

Mes craintes sur sa vie relationnelle et amoureuses ne seraient-elles pas fondées? Je sais qu'iel mène une vie sociale et professionnelle riche, où iel est accepté tel qu'iel est, parmi les personnes (cis) genre, de tendances amoureuses variées, et des transgenres. Iel mène aussi une vie habituelle où iel travaille dur, fait ses courses et sa lessive. Iel assume tout seul. Iel vit, c'est cela le plus important.

Je dois tout de même faire le deuil de la fille que j'ai engendrée, pour une acceptation pleine et entière de sa nouvelle identité. Je dois vous dire que je n'ai connaissance de sa non binarité que depuis le 12 février. C'est tout récent. Oui, je me renseigne, lis des témoignages, m'intéresse à tout ce qui concerne ce qu'iel vit et a vécu. Mais ce qui importe le plus pour moi est que le lien avec mon enfant ne soit pas rompu, qu'iel soit heureux. Je l'aime et le respecte, c'est tout.

Je vous souhaite une très bonne journée.
Nadine

[AliceJ]

Bonjour Nadine,

Je culpabilise en effet pour le fait que je n'ai pas été à la hauteur de mon rôle maternel. J'ai lu que "La dysphorie de genre n'est pas une maladie psychiatrique, mais un conflit dans la construction identitaire". Comment a-t-iel construit son identité dans une famille bancale? En fait, ne serions nous pas responsable du trouble qu'iel a vécu? Iel dit maintenant que c'est sa véritable nature, c'est tout.

J'aimerai vous dire que vous n'avez rien sur quoi culpabiliser car cela n'est pas dû à vous, et iel le dit très bien d'iel-même, mais je doute que vous arriverez à ne pas culpabiliser pendant au moins un moment. Après tout, c'est également une étape pour avancer.

Je souhaiterai également que vous puissiez voir la chose sous un autre angle.
Admettons l'hypothèse, complétement fausse, que au contraire ce soit vrai, c'est réellement votre faute [vous et votre conjoint, ses parents] si votre enfant est trans. Admettons que l'éducation, le climat familial ou autre a fait que votre enfant est transgenre.
Voilà, votre enfant est trans et c'est de votre faute.
En quoi cela changera la situation actuelle ? Si votre enfant est trans, personne ne peut rien y changer.
Nous-mêmes aurions en grande majorité juste voulu pouvoir être cisgenre et/ou hétéro.
Moi-même cela m'intéresserais de comprendre pourquoi je suis trans, mais qu'en bien même je pourrai passer des années et des années à examiner mon passé en quête de la réponse à cette question, qu'est-ce que la réponse changerai pour moi ? Je suis trans, c'est pas possible de changer cela et cela ne m'apportera aucune réponse sur au contraire comment vivre au présent et pour le futur.

J'ai peut-être quelques reproches envers mes parents sur certains sujets, mais jamais cela ne m'a traversé l'esprit de mettre ma transidentité sur leur dos. (Bon, à la rigueur si vous souhaitez vraiment faire un reproche à votre conjoint vous pouvez lui reprocher d'avoir donné le deuxième chromosome X et non un Y )

En tout cas bravo à vous pour votre soutien et votre initiative de vous renseigner sur la chose.
Quelque chose que l'on dit très souvent ici à Contact c'est également qu'il faut laisser le temps au temps.
Avec un coming out qui remonte au 12 février c'est vraiment très frais et c'est pourquoi vous êtes en plein dans vos inquiétudes, et vous aurez probablement l'occasion au fil des mois de voir que au final tout cela ne change probablement pas grand chose car votre enfant reste votre enfant.

En vous souhaitant une très bonne soirée,

Alice

[NadineB56]

Bonjour Alice,
Vous avez raison, que je culpabilise ou pas, mon enfant est non binaire.
Je lui ai posé la question de savoir si cela avait un rapport avec son passé, iel m'a affirmé que non.
Et vivre dans le passé n'est source que de remords, alors que vivre au présent mène sur la voie de l’acceptation.
Alors, je vais cesser de me torturer pour des "pourquoi", ce que vit mon enfant est un état de fait.

En plus, nous aimerions bien parler d'autre chose également.

J'ai lu une maxime de Marc Aurèle qui me plaît:
"Aujourd'hui,
donnez-moi la sérénité d'accepter les choses que je ne puis changer,
le courage de changer les choses que je peux,
et la sagesse d'en connaître la différence."
Tout ce que je peux changer, c'est moi-même!

Je vous souhaite une bonne soirée.
Nadine